Pour cette installation, je me suis inspirée des formes liquides du quotidien. L’eau contenue dans les sacs plastiques provient de la Loire et fut prélevée à même le fleuve, en plein coeur de la ville de Nantes. En m’intéressant à l’eau qui coule en abondance dans nos espaces privés et à sa provenance, je me suis aperçue que le liquide que nous buvons n’est autre que cette Loire vivante et sauvage qui parcourt la ville. Traitée dans les usines de Mauve-sur-Loire puis stockée dans les réservoirs de la Contrie, l’eau voyage depuis sa source et son lit jusque dans les tuyaux de nos robinetteries.

    Pour l’exposition j’ai donc choisi de proposer ce liquide sous sa forme «vivante», comme un élément naturel pas-encore-consommable qui aurait préservé les souvenirs de sa vie de fleuve. Les sacs utilisés pour conserver cette eau nous renvoient à nos habitudes de consommation parfois aliénantes puisqu’il s’agit de sacs utilisés pour mettre les aliments sous vide que l’on trouve dans les grandes surfaces. Ces objets de conservation alimentaire faits pour préserver les aliments le plus longtemps possible évoquent une sorte de frénésie de la consommation qui pousse les habitants à pratiquer une économie de réserve et de conservation.

    La transparence des sacs permet d’observer la qualité de l’eau que nous consommons tout en mettant en avant le lieu d’où elle provient. C’est un échantillon de territoire qui, par sa mise sous scellés, rappelle son trajet, sa conservation et sa mémoire en donnant à voir les travers de nos modes de vie.

    Ces formes fonctionnent comme des petits réservoirs improvisés et presque futiles. Entassés sur une étagère de métal, ils sont stockés comme on stockerait des sacs de riz dans un placard de cuisine, prêts à se rompre pour répandre leur contenu au pied de la structure métal qui tente de retenir leur chute.